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18/12/2020

Comment éradiquer le burn-out dans une entreprise ?

« Comment résoudre une problématique de burn-out? » C’est la question que nous a soumis la direction d’un grand groupe industriel, à l’échelle de son siège social. La feuille de route que nous a donné le client est la suivante : « nous avons des cas de surmenage et de burnout qui augmentent, et le nombre de collaborateurs qui ont dépassé le seuil d’alerte du niveau de stress est proche de 20%… ».

La direction de ce grand Groupe, très impliquée, entreprend régulièrement des actions de prévention. Elle souhaite identifier les raisons du mal-être des équipes de son siège social et fait appel à Alixio pour déterminer les failles organisationnelles et managériales responsables de cette situation dégradée.

Sur un plan factuel, l’engagement de l’entreprise est réel : la Direction est très concernée, elle va effectivement au contact des salariés, les réunit en petit comité au cours de petits déjeuners, lance chaque année une enquête auprès des collaborateurs pour prendre la température interne, savoir ce qui va, ce qui va moins bien. Elle a instauré des programmes de formation pour expliquer ce qu’est le stress, a pris la peine d’adresser à l’ensemble des collaborateurs un message sur des règles communes -comme celle de ne pas envoyer de mails après 19h et avant 9h.

Organisation matricielle

Alors, qu’est-ce qui ne va pas ? Qu’est-ce qui ne fonctionne pas, sachant que les cas de burn-out augmentent alors que le direction pense avoir tout mis en place pour lutter contre ce fléau ?

Dans cette entreprise, nous sommes en organisation matricielle avec un reporting hiérarchique complexe, des n+1 pas toujours bien identifiés ou trop nombreux, dont beaucoup quittent suffisamment vite (3 ans) le siège social pour se mettre en valeur auprès de la Direction générale dans des postes de direction ou opérationnels en régions. Une enquête interne de plusieurs dizaines de questions est devenue au fil du temps un outil stressant d’évaluation des managers qui ne dit pas son nom.

Le travail en mode projet pourrait agrémenter le travail au quotidien par la diversité des taches, mais est rythmé par le calendrier des présentations au CoDir (Direction générale), donc une organisation de fait, en silo.  Ces présentations stressent toute la ligne managériale, du Directeur qui est à l’ordre du jour aux petites mains qui aident à la préparation de la réunion ! La Direction générale a du mal à comprendre ce qui se passe en interne car « personne n’ose rien dire ».

D’abord, nous avons reçu des collaborateurs en entretien dit qualitatif semi-directif, une technique d’études de marché pour sonder les consommateurs et réduire au maximum les mécanismes d’autocensure. Dans le cas décrit ici, il s’agit de collaborateurs que nous interviewons sur leur vécu et leur ressenti au sujet du stress au sein de leur entreprise.

Sur ce type de sujet, les sujets évoquent ce qui les fait souffrir et évoquent en vrac les exigences de la Direction, les taches qu’on leur demande d’exécuter ou celles qu’ils s’imposent faute d’indications précises et, d’une manière générale, décrivent l’organisation du travail telle qu’ils la vivent.

Résistances conformes à la « courbe du changement »

Le plus difficile dans cette mission, ce ne furent ni les entretiens – toujours riches en informations et en « instants d’humanité », ni le travail d’analyse lui-même. Le plus difficile ce fut paradoxalement de sensibiliser la Direction générale aux résultats de l’étude qu’elle avait commandée. Car l’information remontée était non biaisée par des intermédiaires, et donc « brute de décoffrage », avec des résultats parfois inattendus voire difficiles à entendre.

Par exemple, la Direction générale nous a « challengés » sur la constitution de l’échantillon : était-il « vraiment représentatif ? » Oui, il l’était. La Direction est restée perplexe : « mais nous avons déjà tout essayé, et nous savons déjà tout ce que vous nous dites ! ». La réponse apportée : « c’est possible, mais il n’en reste pas moins que votre organisation du travail est perfectible, car elle ne permet pas aux salariés d’avoir des repères dans leur travail ».

Nous avons également rappelé l’obligation de résultat à laquelle est soumis l’employeur en matière de sécurité et santé au travail tant physique que mentale.

Enfin, nous avons relevé que l’absence totale des IRP (« instances représentatives du personnel » NDLR) dans le discours des interviewés -alors que le sujet devrait les amener à les évoquer-, montrait un fort isolement des collaborateurs. Les réactions de la Direction furent donc conformes à celles de la courbe du changement : d’abord le déni (« non, ça ne va pas aussi mal que ça »), puis la résistance (« nous n’avons pas le temps de tout changer »), le marchandage (« est-ce qu’on peut faire une autre série d’entretiens? ») …et finalement l’intégration, c’est-à-dire un accord sur le principe d’une action très concrète.

Comment éradiquer le burn-out dans une entreprise

Organigramme remis à plat

L’organigramme du siège social a alors été remis à plat, l’organisation du travail a été passée au crible, département par département, du marketing au juridique, en passant par l’audit, les RH, les Achats, les Risques, le Digital, de la base au sommet.

Cette remise à plat a permis de mettre à jour le problème de fond, qui était la cause du burn-out : le décalage entre les demandes nouvelles de la direction (taches nouvelles, missions supplémentaires, etc…) et la faiblesse voire l’inexistence des moyens mis à disposition. Le stress négatif ou «distress » venait de là…

La Direction générale a donc désigné un groupe de travail élargi à géométrie variable selon les périmètres, pour améliorer concrètement l’architecture de cet ensemble de réseaux et pallier le déséquilibre entre la perception qu’avaient les collaborateurs des demandes qui leur étaient faites et les ressources mises à leur disposition pour y répondre.

Du coup, l’entreprise a appris à mettre des moyens à la disposition des cadres quand ces derniers devaient accomplir de nouvelles tâches ou de nouvelles missions. Cette suggestion a eu un effet très bénéfique, dans la mesure où s’imposer de s’interroger sur les ressources qui devront être mises à disposition des cadres quand une nouvelle mission leur est confiée revient à mesurer l’intérêt réel de la demande en question.

Aucune ressource ne peut être mise à disposition ? Alors cela signifie qu’au fond, la demande n’est peut-être pas nécessaire.

La demande est nécessaire ? Comme par miracle, des ressources peuvent être trouvées.  A noter que les « ressources » n’étaient pas forcément financières : il pouvait s’agir d’un budget, certes, mais aussi de temps, du recrutement d’un stagiaire ou d’un employé, de mise à disposition d’informations.

Cela a considérablement freiné la tendance à la bureaucratie qui guette une grosse organisation comme un siège social. Et la problématique « burn out » a finalement débouché sur une réorganisation plus générale : cette problématique était simplement un symptôme d’un dysfonctionnement plus profond, qui a pu être détecté et résolu.

 

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